Dernières gambades en Argentine… y hola Bolivia !
Ha, Salta…
Nous l’avons en ligne de mire depuis quelques centaines de kilomètres déjà, soit quelques semaines (!), à peu près depuis que nous saturons de cette poussière omniprésente, du froid et de l’altitude de la Puna. Synonyme de pause gourmande, tiède et humide, Salta nous tendait ses petit bras potelés pour qu’on s’y refasse une santé, qu’on prenne un peu de gras, et qu’on remette le camion à neuf. Après quoi, nous tracerons vers la Bolivie en 2 coups de cuillères à pot, têtes baissées et embrassant avec entrain et naïveté sa rusticité légendaire. Nous mettrons alors, le moment venu, un terme à cette incroyable aventure argentine, 4 mois et demi d’un périple qui nous gâta au delà de nos espérances et du raisonnable.

Mais bon, chaque chose en son temps. Pour le moment, c’est gavage à Salta.
Vous pouvez retrouver les photos de ce bout de chemin ici
Ca piiiique
Une larme s’écoule lentement sur ma joue bronzée et tombe sur le sol en béton de la boutique alors que je lui fais répéter le chiffre. Par décence envers les non-millionnaires qui nous lisent, je tairais le prix de ce pneumatique tant convoité. Je dirai seulement qu’il s’évalue à une europalette d’empanadas de carne. Faites le calcul.
Paradoxalement, c’est aussi un grand soulagement qui m’envahit. je l’embrasserais presque ce grand dadet qui m’annonce ce prix exorbitant sans trop y croire lui-même, alors que j’entrais sans espoir dans ma 17ème gomeria (boutique de pneus) de la matinée. En vrai, j’étais à deux doigts de me résigner à continuer le voyage sans roue de secours (cf l’épisode précèdent où notre roue arrière-droite fit une sortie théâtrale de notre voyage), ce qui se serait avéré un tantinet présomptueux, l’histoire nous le confirmera…
C’est donc délesté d’un bon paquet de billets mais ho combien rassuré que je rentre au camping, victorieux, promesse de pneu en poche. Nous avions trouvé la veille ce grand « balneario » (camping-bungalow-loisirs en tous genres) doté d’une piscine aux dimensions hors normes (mais pas de bol, vidée depuis quelques jours) et nous entamons tranquillement notre mue de famille nomade tout-terrain (comprendre par là : une douche et un caleçon par semaine) vers la peau de routards en pause urbaine, en tong, qui se lèvent tard et qui se nourrissent de barbecue… Mais qui ont néanmoins une todo-list conséquente, et au sommet de laquelle trônait la recherche d’un XZL 335 80R20, un pneu, donc.






SALTA centro
Salta, j’en gardais un souvenir suave est doux, mélange de torpeur latino et de rusticité andine, où ses légendaires empanadas de carne juteuses et légèrement sucrées sont servies par des serveurs au faciès bolivien, la joue gonflée par les feuilles de coca….
Ca a un peu changé. Ou alors j’ai la mémoire sélective. Il faut dire que la dernière fois, il y a 13 ans, nous n’avions fait que le centre historique, sans jamais poser le pied dans les quartiers un peu plus laborieux, ceux que la recherche d’un pneu, d’un phare, la remise en état du collecteur, et des vidanges (parce que oui, y’a ça aussi) nous firent visiter. Dans ces coins là, Salta c’est, comme partout en Argentine, de la poussière, du bruit, des voitures sans âge pétaradant dans les odeurs de poulet frit.




Mais le temps de flâner, on l’a. On reste une dizaine de jours, tandis que le pneu arrive (il vient de Buenos Aires), et on s’offre le loisir tant mérité de lézarder dans le centre ville colonial. La température tourne autour de 25°C, les terrasses sont calmes, les prix bas, il y a de l’ombre et de la bière… tout nous invite à de longs moments d’inaction. Que bueno !
On mangera beaucoup. Finis les plats de riz et les soupes. C’est empanadas, glace, croissants … et gros Mac. On fera 2 ou 3 musées, à l’instar des quelques touristes lambda, essentiellement argentins, qui déambulent comme nous dans ces rues piétonnes tellement animées et bruyantes.
















Et puis nous fîmes de belles rencontres au camping. Il faut dire qu’il est presque vide, nous sommes hors saison, et seuls des camping-cars et camions étrangers comme nous viennent s’y reposer, rentrant de Bolivie ou s’apprêtant à y poser la roue. Par exemple, on croisera l’impressionnant Tatrakolemsveta2 (un GROS camion tchèque) en rade ici, le beau merco d’un retraité de rotel, des vans et camionetas petits et gros… On échange des tuyaux, parle de nos bonnes surprises et galères de voyage. Il y aura Oscar, cette crème d’argentin qui me promènera en ville pour mes emplettes, les Anotretour, camposLolita si attachante petite famille nomade, alwayschangingplans qu’on retrouvera plus tard, Charles et Tess, Vincent et Rosa et leur 504 rutilante… Bref, du routard pur et dur, tous en pause gourmande et salvatrice à Salta.
On saisit aussi l’excuse d’une vidange qui prendra 2 jours pour laisser le camion dans un atelier de la périphérie et se récompenser d’un petit appartement avec piscinette à deux pas de la place centrale. #glande
Pas mal de temps morts mais quel délice. Et quand on prend même le temps de laver son camion, c’est qu’on a épuisé sa todo, et qu’il faudrait peut être penser à se remettre en route. Alors nous repartîmes.





Direction Ruruï… Aïe aïe!
On est reposé, alors vroum, on reprend du service!
Apres Salta, l’arrêt un peu obligé mais pas très glamour, la dernière grosse ville d’argentine, c’est San Salvador de Jujuy, a.k.a Jujuy (prononcer « Rourouille »). On y prévoit un stop express avant de traverser l’extrême nord argentin (à savoir, le mont au 7 couleurs, Humahuaca, tout ça…) et ficeler la visite de cette Argentine tellement généreuse. Jusqu’à Jujuy, c’est de l’asphalte tout du long. Chose rare: de l’autoroute, même ! Alors on y va gaiement. On appuie sur le champignon. Aucun de risque de quoi que ce soit.
Mais ça, c’est pour les gens normaux.
Parce que nous, sur de la route bien lisse et droite, et bien…. on explose un pneu, rogntudju ! Le pneu de secours, un peu sec et en légère surcharge (il doit bien supporter 3,5 tonnes à lui tout seul alors qu’il est lisiblement inscrit 2250kg sur le flanc, y’a qu’a regarder pourtant) n’a pas accepté les 80km/h qu’on lui inflige et explose en pleine autoroute. BAM ! Dans la cabine, on affiche des faces de Droopy, résignés.
Nous réussîmes tant bien que mal à nous arrêter sur la bande d’arrêt d’urgence (l’expérience, sans doute) mais la lassitude qui nous habite à ce moment précis nous anesthésie totalement et empêche de ne-serait-ce sortir le cric. Marie trouve une gomeria dans le coin qui viendra faire le travail et mettre le tout nouveau pneu encore brillant à l’épreuve. Pour 2000 pesos, soit 8 euros, pourquoi s’en priver? On retrouve presque l’ombre d’un brin de sourire. En plus, l’armoire normande (champion d’haltérophilie, on l’apprendra par la suite) qui nous dépanne pense sincèrement qu’on pourra trouver un pneu similaire dans la ville, d’occasion bien sûr. Alors ça, ça nous requinque carrément même.






Sauf que les pneus dégotés à l’endroit indiqué ne sont pas de la bonne largeur, manquent un ou 2 centimètre de hauteur, (ce qui imposerait de changer l’essieu complet) sont quand même bien bien usés, et coutent un oeil. A l’argentine, quoi… ben c’est non, on se débrouillera.
Tremblants, on va passer la journée et la nuit dans les termes du coin, en roulant à 30 à l’heure, et on verra demain. C’est une journée déjà bien remplie, non?







Le lendemain, c’est chez José (le dépanneur de la veille avec des crics à la place des mains) qu’on trouve refuge. On se gare devant chez lui, dans la banlieue cabossée et besogneuse de Jujuy, et on commande le même pneu qu’à Salta. Même prix. re-snif. Là aussi, il vient de Buenos aires et la livraison nous laisse 3-4 jours de flottement dans cette ville pas folichonne. Où en plus il pleut. Décidément.
L’extrême nord Argentin: bande annonce de la Bolivie
Allez, on reprend du poil de la bête et on met ce temps mort à profit !
On loue une voiture pour 3 jours et on visite les bourgades altiplaniennes de Tilcara, Pumamarca et Humahuaca, ainsi qu’un Salar bien aride comme il faut, le Salinas Grande. 3 jours à baguenauder en voiture entre ces bourgades qui annoncent clairement, par les vêtements si colorés, le teint foncé, les pommettes saillantes de leurs habitants, et leur architecture d’une sobriété extrême, la Bolivie si proche. Des prémices qui nous donnent l’envie d’avancer. Et puis certes, on va étrangement vite en voiture (comprendre plus de 80km/h), et la route s’avale en un rien de temps, mais ces heures de conduite en berline, pendant lesquelles la position de vigie qu’offre le camion nous manque terriblement, et dormir dans les auberges de jeunesses, étriquées, bruyantes (merci le concert jusqu’à 5h du mat !) et à l’hygiène douteuse, nous font clairement réaliser la chance, s’il en était encore besoin, que nous avons de voyager avec GEO.



















On est content de le retrouver ce gros bonhomme orange. La roue est arrivée de la capitale, on va pouvoir repartir et passer la frontière bolivienne, dans 2 jours sans doute car il y a quand même 2000m de dénivelé d’ici là et je préfère ne pas pousser la bête, encore convalescente. A partir de maintenant, c’est “qui va piano va sano”.
Jose nous monte le pneu en un rien de temps. On se fait un câlin. Je sens poindre dans le regard de ce grand mutique toujours fier, un brin d’émotion et le léger regret de ne pas voyager lui aussi. Il finit par poser la question du budget pour un tel camion, on divise immanquablement tout par 3 mais cela semble encore un rêve inatteignable pour nos hôtes.
Les gens d’ici, et de cette Argentine moins visitée en général, ont été si accueillants, ouverts, curieux, parfois admiratifs mais sans jamais laisser entrevoir une quelconque jalousie. Ils ont été une vraie richesse de ce pays, qui en compte tant. Et ils vont nous manquer.



Les boliviens, et les péruviens ensuite seront-ils du même acabit? Nous verrons bien!
Frontière en vue
Nous voilà de nouveau sur les routes, ca y est.
Première journée, RAS, jusqu’au soir. Nous mettons derrière nous la longue montée au nord de Jujuy qui nous élève dans les nuages et leur froide humidité. On dort d’ailleurs là, au sommet, dans la brume, sur le bord de la route, un parking de routier vide et tranquille nous offrant l’abri. Un chocolat chaud, pain-confiotte, et dodo.
Le lendemain, peu avant midi, on arrive après 150 km de cactus et quebradas à La Quiaca, le poste frontière. Il faut y faire des tests antigéniques, seulement pour les non-vaccinés (les enfants, donc). Chance folle, les règles d’entrée en Bolivie ont changé…la veille ! Régler la paperasse pour nous et la douane pour le véhicule, retirer quelques bolivianos et trouver une assurance finissent d’occuper cette journée-frontière finalement pas si galère que ca, GEO garé juste en face de la barrière rouge et blanche.




Ce qui nous marque d’emblée lors de cet arrêt, c’est que, même avant de franchir la ligne, on est en Bolivie: du bruit, de l’agitation, des petites bonnes femmes en jupe et chapeau, l’odeur de viande et de fruit… et les ordures, dans les rues, un peu partout. Coup d’oeil
…and Bolivia, here we come !
Le portail de la frontière se lève enfin et fait directement pénétrer les arrivants dans le coeur de Villazon, le coté bolivien de ville de la Quiaca. Autant dire que les premières centaines de mètres boliviens se font en pente prononcée, nous, scrutant les câbles téléphoniques et les façades de magasins de bric-à-brac que le camion frôle. Petite suée syndicale et nous mettons le frein à main en bordure de ville dans une station service qui nous accueille pour la nuit. Un petit saut dans une inattendue pizzeria (resto d’un chic certain pour la région, sans couvert et mobilier en plastique, doté d’un … trampoline ??) et pour aujourd’hui, ca suffira.


La Bolivie ne se dévoilera vraiment que le lendemain, lorsque le jour se lèvera sur la route, mais déjà, il est palpable que nous venons de changer de peuple, de mode, de culture. Villazon est bordélique, les commerces sont nombreux mais modiques. Mais ca marchande, ca crie, ca s’entasse dans des remorques en guise de bus. Ca vit.
Nous entamerons notre tournée en terre Quechua par une infidélité au camion. Un impressionnant tour dans le sud Lipez aussi mineral que solitaire.
Mais ca, c’est une autre histoire…
stay tuned!
Pouvez retrouver les photos de ce bout de chemin ici
2 commentaires
Mais qu’est ce qu’on adore ❤️ On vous kiffe les 5 Geonautes !
Merci de partager votre belle aventure