U-SHU-A-ÏA !

C’est quelque chose que d’arriver à Ushuaia, d’avoir parcouru chaque kilomètre de l’exigente ruta 3 pour poser le pied dans cette ville mythique, d’avoir répondu milles fois « hasta Ushuaia » à la question « a donde van, chicos? ». Fin du monde, fin de la route, objectif ultime de routard. Combien de voyageurs, obnubilés par Ushuaia, ne savent même plus où mettre le cap une fois ce graal atteint et restent là quelques temps, comme vidés de leur jus, incapables de se donner un nouvel objectif tant ce dernier paraitrait pâle.

Les photos de ce bout de chemin sont ici

Ushuaia revêt pour tout cela une signification bien particulière dans ce voyage. Et nous serons nous aussi touchés par l’ushuaiïte aîgue: une mini-prise de racine qui fait  rajouter un jour, puis un autre, et un dernier sivouplé, pour être enfin certains de s’être remplis au maximum de son aura, repus jusqu’au gosier, avant de la quitter, sans doute pour toujours.

Premier contact

Alors là, si je m’attendais… L’arrivée à Ushuaia est surprenante. Dans le bon sens et le moins bon. Je commence par lequel? Devinez…

Les premiers abords sont fumeux, usineux, gris, terrain-vagueux. Pour accéder au centre, il faut traverser toute une zone industrielle qui descend à travers les montagnes jusqu’à la mer. Banlieues faites de garages, d’entrepôts, distillerie… S’en suit un centre commercial (carrément!), puis les commerces variés, et enfin le centre ville, au bord de l’eau, plus harmonieux mais tout autant affairé, commercial, bondé, criant ses promos, vous tirant par la manche pour déguster un chocolat chaud, manger du crabe, ou acheter un souvenir forcément décoré d’un pingouin ou d’un prisonnier, l’une des attractions de la ville étant son ancien bagne du début du siècle dernier (là vous avez appris quelque chose, hein? avouez-le). Enfin bref, la ville est grande. Gigantesque même, si on se rappelle où l’on est, soit au bout du bout du monde. 

L’hyper centre, la rue San Martin, a même des allures de stations de ski un peu chic, dont le confort des bars lounges qui n’ont rien à envier à la rue des Abbesses tranche singulièrement avec le décor.

Parce que l’autre aspect frappant d’Ushuaia est son écrin de nature d’une rudesse et d’une beauté rares. Les montagnes acérées aux neiges éternelles, d’abord, qui font office de fond d’écran haute résolution où que se pose le regard, derrières les toits, au bout des rues, de l’autre coté du canal. Ce Canal Beagle  ensuite, froid et souvent mouvementé, qui limite la ville sur son bord sud et qui lui donne son âme océane, son odeur, et ses ports. Le Parc National de la Terre de Feu enfin, immense et chargés de sentiers de randonnées découvrant forets, monts et lacs, et qui l’entoure à l’ouest.

Ushuaia est décidément un hub particulier, promettant au routard ayant fait l’effort de s’y rendre à la fois repos et aventure. 

Autre fait marquant, on croise beaucoup de camping cars, des argentins pour la plupart, avec parfois des camions rafistolés de toutes parts et équipés comme des caravane de forains (à l’image du camion El Nono, qui reste dans nos parages depuis Puerto Madryn).

Le camion Orange produit toujours son effet (on reste les plus gros et les plus… oranges) mais nous ne sommes plus les seuls, et ca fait du bien de se fondre dans le brouhaha de camionneurs au long cours.

Un programme gargantuesque

Nous passâmes à Ushuaia 15 jours (quin-ze-jours, non de dious !) bien remplis d’activités aventureuses et/ou nécessaires (vous mettrez lessives, halte au garage et achat de souvenirs dans la categogie que vous voulez) aussi serait-il difficile pour moi (et carrément barbant pour vous, vous pouvez le dire) d’en faire l’inventaire. Je me contente alors du résumé:

D’abord la 1ère nuit. Nous décidons de la passer dans le parc National. Direct dans le jus. Et comme on arrive un peu tard, plus personne dans la cabane de rangers pour nous faire payer l’entrée du parc héhéhé (ça c’est un tuyau pour vous. cadeau). Ce qui nous permet d’attaquer dès le lendemain matin avec notre invitée de la semaine, Jess, un petit trek sympa et très plat qui nous mène jusqu’à  une invisible frontière chilienne, en pleine forêt. Et là, pas un douanier pour nous faire suer et confisquer nos pommes et peaux de bananes. Du coup on se fait quelques pas en toute illégalité au Chili en mordant dans une belle pomme juteuse Argentine ! Prends ça !

Ce soir là, on découvre un vrai bon plan qui servira à nos nombreux lecteurs: pour passer une nuit tranquille, garez votre camping car sur le terrain vague devant l’aéroport. La presqu’ile de l’aéroport est très tranquille (c’est pas CDG), et son promontoire offre une vue splendide sur la ville et les montagnes qui l’encerclent, tout en se trouvant à 5 minutes à peine du centre. On reviendra plusieurs fois y passer la nuit après nos escapades urbaines ou natures, jusqu’à ce que le vent nous en chasse définitivement. Situation trop exposée. J’en profite pour rendre hommage à la belle paire de valoches dont doivent être dotés les pilotes de ligne qui atterrissent ici dans ce vent qui rend fou.

On dit ensuite au revoir à Jess. On la laisse avec des étoiles dans les yeux, et un petit blues de retour en France (enfin, on se convainc que ce sont les quelques jours avec nous qui lui font cet effet, et pas du tout les 3 semaines de folaye passées avec Cristian)

Durant nos jours ici, avec les enfants, on n’a pas chomé, niveau rando. Montée du glacier Martial qui offre une vue dingue sur la ville, le canal beagle et le Chili derrière. Randonnée de la laguna Turquesa, escarpée et raide comme un escalator des galeries lafayette pendant les soldes, la splendide Cascade Beban, se jetant dans la foret, bijou d’une nature qui est décidement pas rancunière et  que nous avons eu la joie de rejoindre sans croiser personne, magique. Je souhaite rendre un autre hommage à ce courageux papa qui fit ces treks de catégorie « difficile » avec son petit ange de 20 kilos sur le dos lui criant comme pour l’encourager « plus vite papa », « fais le cheval papa », « chante reine des neiges, papa » (ha, on me dit dans l’oreillette que c’est moi… bon ben, bravo jonath, dis toi qu’elle te doit ça, quand tu seras vieux ).

Coté nature, je garde aussi en tête cette nuit de camping au fond du parc national, par temps de vent, froid, et neige (!), au bord de l’eau, à se faire un gâteau au four en matant des films au projecteur… elle est pas belle, la vie?

Et puis la ville aussi a plusieurs attraits que nous ne nous privâmes pas d’exploiter, outre les innombrables arrêts chocolats chauds et gâteaux. D’abord le lugubre musée de la prison, dont les murs des cellules sont couverts des rêves de Liberté des occupants et qui donne des  frissons longtemps après quand on s’imagine les pauvres bougres qui y ont laissés quelques années, voire leur vie, entourés de froid, de glace, et passant l’essentiel de leur temps à construire la ville que nous arpentons.

Plus joyeux, une superbe sortie en mer (conseil numéro 3: choisir un petit bateau pour plus d’intimité) qui nous promena entre les iles du Canal Beagle, rasés de près par les goëlans, et autres mouettes ou cormorans, pour observer phoques, lions de mer, pingouins dans le froid tout estival.

Je me suis aussi fendu d’une plongée en eaux froides. Une expérience qui me faisait de l’oeil depuis une balade impromptue au port et la découverte que ce genre de chose existait et ne coutait pas un rein. Pas de poison multicolore ni dauphin venant vous chatouiller les orteils. Non. Ici, c’est foret d’algues hautes et araignées de mer. De grosses étoiles de mer bleues venant égayer tout cela. 

Les jours de grand vent ou de pluie, on a aussi su rentabiliser notre temps hors du camion qui décidément bouge beaucoup trop. Cinoche (3eme fois qu’on voit Sing 2, en Espagnol… les enfants commencent à comprendre certaines répliques. Et Elisa me demande toujours, apeurée, si le gentil va gagner), Et un petit arrêt au garage pour rajouter des feux longue-portée et faire une vidange de routine grâce a mes amis de Motul.

Nous croisâmes quelques aventuriers de l’hexagone à Ushuaia.  Comme JB et Diane, 2 français complétement locos qui ont fait le trajet jusqu’ici en voilier et attendent une « fenêtre » pour aller poser le pied en Antartique. J’en reste baba, devant ces vagues démontées et des rafales de vents affichées à 134 km/h. Chapeau les gars. J’aurais du prendre une palanquée de caleçons si j’avais fait ce que vous vous infligez.

Je pense que c’est clair, Ushuaia a beaucoup à offrir et aimante pas mal les voyageurs qui repartent tous plus tard que prévu. D’autant qu’il convient de rajouter à l’équation du séjour l’insistance de notre ami Eole à secouer tout ce qui bouge ici. Le vent qui règne a Ushuaia est une chose qu’il est difficile d’expliquer. Il se lève brusquement, sans crier gare, et vous cloue pendant plusieurs jours. 

Voila en quelques mots notre escale au bout du monde. Les photos de ce bout de chemin sont ici

Depuis, nous avons repris la route, bien bourlingué même. On quittera bientôt la ruta 3 pour la ruta 40, en bordure de Cordilière, qui est presque 2 fois plus longue que sa soeur côtière et nous emmènera à la frontière bolivienne.

On a également retrouvé un peu de chaleur (sans être les caraïbes non plus, mais on peut retirer les doudounes) et dit au revoir au vent qui rend fou sur les routes d’El Calafate, d’El Chalten et Bariloche.

Mais tout ca, c’est une autre histoire…

Stay tuned !

9 commentaires

  1. Régine et Pierre dit :

    Un grand merci pour ces superbes nouvelles !!!

  2. Magali dit :

    Hello la famille!!! Savoureux ce nouvel article!!
    On a l’impression d’avoir un peu partager ce bout d’aventure en terre de feu!!
    Message pour Elisa : moi aussi jai toujours peur pour le Héros de Sing!!!!! En français il s’appelle mr.Moon….. en espagnol ?? Sr.Luna??
    Besitos a todos !
    Les 4 Baroudeurs Nantais !

    1. jonathetmarie dit :

      il se dit Senor Moon aussi ! Elle pourra t’en parler des heures ! 😉 bises a vous 4

  3. Alex dit :

    Jonath, j’adore ton style d’écriture 😊
    Et dis donc, la prochaine fois on se la fait ensemble cette plongée en eaux froides ; belle épave à 30 mètres ce matin à Puerto Madryn 😉

    1. jonathetmarie dit :

      Merci Alex ! Quel plaisir de vous avoir croisés. Une épave a Puerto Madryn ? j’arrive !

  4. Flahaut dit :

    FA BU LEUX
    Vous êtes acteurs de votre belle aventure et la communication de ces moments exceptionnels apporte envie et émotion.
    Je kiff de vivre régulièrement ces découvertes ces paysages au travers des aventures contées.
    Entre nous Jules Vernes devrait vous contacter pour les droits. Mais ne l’ebruitons pas encore.
    Bisous les cousins.
    Bon vent

    1. jonathetmarie dit :

      Merci Manu. On ecrit rapido les prochains épisodes ! la bise à vous

  5. Marine dit :

    Merci pour le récit et les photos! C’est un plaisir de vous suivre! Bisous à toutes la famille

    1. jonathetmarie dit :

      Merci pour le message ! Content que ça vous plaise ! c’est important de partager aussi… 😉 gros bisous à vous

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